LE CARCAN DU SUIVISME

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Comment peut-on nous mettre debout et marcher vers de nobles ambitions alors que le carcan du suivisme jurisprudentiel nous enserre le cou ? Comment peut-on avec des handicaps aussi lourds que notre Histoire et notre patrimoine culturel, discourir d’une alternance prophétique et d’un avenir pour l’Islam sous égide d’un État de Concertation, d’Équité et d’Ihsane ?

Comment penser cet avenir d’unité, de puissance et de transmission du Message éternel à l’univers ? Comment exprimer les besoins de l’humanité, ses complaintes et ses ambitions ? Comment protéger Le Dîn de Dieu venu défendre le vrai et rendre justice aux opprimés conformément à la voie agréée par Dieu ? Comment donc faire alors que ceux qui sont supposés nous éclairer et nous instruire sont bien en-deçà de la Connaissance, du Coran et de la Sunna ?

I- Paresse intellectuelle et la médiocrité des esprits :

L’arme fatale aux mains des tyrans n’est en réalité ni l’arme classique, ni la férocité de leurs tortionnaires qui sont légion, mais bien ces entraves que sont la paresse intellectuelle et la médiocrité des esprits lâchement réfugiés dans les tanières du suivisme paisible.

D’autres que nous ont dressé les tables d’une démocratie factice ou autres simulacres travestis d’oripeaux hypocrites. Ils nous en chassent comme on chasserait quelque parasite. Hélas, certains esprits ineptes, pris dans les toiles poussiéreuses du suivisme et de la soumission abjecte au pouvoir ne voient pas d’inconvénient à se repaître de miettes illicites. Pigeons bien dressés, ils picorent allègrement ce que les tyrans sanguinaires veulent bien leur concéder, ne pensant qu’à leur propre salut. Un salut comme le conçoit celui qui est nourri et blanchi.

Cette mentalité maladive porte ombrage à la conscience de la Oumma et décrédibilise les gens de l’Appel lorsqu’ils dénoncent ce complot séculaire fomenté par les gouvernants et ces gardiens du temple de l’injustice que sont ces « oulémas de service ».

Je n’entends point par « se libérer du suivisme juridique » le fait de mépriser tout ce que l’Ijtihad d’oulémas sincères a produit en matière de jurisprudence (fiqh). C’est un effort louable, fourni par de pieuses gens pratiquant dans la conviction. Je vise plutôt, disant cela, la détestable mentalité dont le confort de l’appartenance au système empêche la remise en question. Ce même confort empêche les porteurs de cette mentalité de régler l’acuité de leur vision de la réalité des musulmans sur le Coran en usant de la lunette de la Sunna. Ce qui est à la base même de l’esprit critique et du devoir sacré de « l’exhortation à l’acte louable et la réprobation du blâmable » (al amr bilma’rouf wa annah’y ’ani al mounqar), attitude qui devrait, au moins une fois dans une vie, inciter à dénier le faux, voire à exprimer sa colère à son encontre et contre ses représentants.

*II – Question de méthode : *

Quelle est la méthode à adopter pour nous débarrasser de la mentalité moutonnière sans tomber dans celle de l’extrémisme expéditif ? Quelle méthode adopter pour nous débarrasser des œillères de la soumission et de l’ajournement continu de nos projets ?

Comment reconquérir la capacité d’initiative et dresser nous-mêmes les banquets de l’Islam dont les mets principaux seraient la Concertation, l’Équité et l’Ihsane et auxquels nous convierions l’humanité à un festin de miséricorde et de charité ?

Nous sommes actuellement gouvernés par des tyrans à cause des tares de ceux qui miment, de ceux qui se soumettent, de ceux qui craignent, de ceux qui convoitent, de ceux qui falsifient. Tout comme nous étions gouvernés dans le passé par des despotes et pour les mêmes raisons. Nous n’avons d’autres choix devant cet asservissement et cette démission face au pouvoir que de nous défaire de cette habitude héritée et de renouer avec la Sunna et la méthode prophétique.

On respirerait à nouveau, dans cet espace de foi, l’air embaumé de l’Ihsane. La Oumma s’autogouvernerait à l’ombre des vertus et des bienfaits de la Concertation et de l’Équité confondues, de l’affiliation spirituelle, de l’appartenance à une communauté de foi, de la souvenance de Dieu et de la conviction en Lui, du don(al badhl) pour l’amour de Dieu, de la Connaissance, de la noble attitude (assamtou al hassan), de la pondération, de l’économie et de l’Effort.

Histoire et Droit musulmans p33-35

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